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Couvre-feu sur la nuit sociale

interpellation des collectifs du 29 mai...

lundi 28 novembre 2005, par souriez

L’activation des dispositions de la loi 1955, en clair " l’état d’urgence " contre les banlieues, est prorogée pour une durée de 3 mois.

Rappelons-le : cette loi permet à tout préfet d’instaurer le couvre-feu dans tout ou partie du département, d’y interdire les réunions, les manifestations, les films et les spectacles susceptibles de troubler l’ordre public. Elle permet de fermer cinémas, théâtres, cafés, salles de réunions, d’ordonner l’interdiction de séjour et d’assigner des personnes à résidence.

La loi donne le droit de perquisitionner jour et nuit, de contrôler l’information écrite et audiovisuelle.

Ces pouvoirs d’exception, accordés initialement douze jours jusqu’au 21 novembre, sont renouvelables par le Parlement, et extensibles, pourquoi pas, jusqu’au transfert de pouvoirs exceptionnels au Président de la République prévu par l’article 16 de la Constitution.

A ce jour, l’état d’urgence n’avait été appliquée qu’en Algérie, pendant la guerre d’indépendance et à Paris en octobre 1961 avec les résultats que l’on sait. La droite au pouvoir n’avait pas osé l’instaurer en mai 68.


Et nous sommes paralysés tant est impressionnante la brutalité gouvernementale administrée.

Le sentiment d’impuissance attesté par notre passivité collective marque notre assujetissement.

La réponse, démesurée au regard des évènements, ne relève pas d’une simple gesticulation du gouvernement entraîné par le ministre de l’Intérieur. Nicolas Sarkozy tire profit du vide politique laissé par une gauche officielle en lambeaux. Il profite aussi de l’effacement du Président de la République. Le nouveau chef incontesté de la droite dispose à la fois d’un appareil politique - l’UMP et sécuritaire. La voie est royale pour prendre le pouvoir. De fait, le ministre de l’Intérieur est bien placé pour manipuler la presse et instrumentaliser la police. Il use à volonté du choc des mots, des formules et des médias dans sa campagne de communication, comme en témoigne sa petite promenade dans les quartiers d’Argenteuil, parfaitement organisée et préméditée. Cet ordre de bataille conforte la droite qui resserre les rangs et ne trouve rien à redire à l’état d’urgence. Or, malgré les séismes électoraux en faveur de l’opposition, " la gauche " peine à s’exprimer en dépit de la gravité des évènements. Il y a bien eu des communiqués sur l’état d’urgence. Mais le dernier bureau national du PS est resté profondément divisé : les " Hollandais " ont approuvé l’état d’urgence, les minoritaires, dont les maires de Seine-Saint-Denis, se sont prononcés contre. On ne joue impunément avec les mesures d’exception !

Surveiller et punir

Cette situation est dangereuse, car Sarkozy est en train d’activer le racisme supposé ou latent pour diviser profondément les classes populaires. Sur quelle autre information, si ce n’est le délit de faciès, la police parisienne pouvait-elle interdire les attroupements dans la capitale ce 12 novembre ? Les étrangers arrêtés, en situation régulière ou pas, seront expulsés sans délai. Le ministre de l’intérieur veut ancrer la peur, faire des Africains et des Maghrébins des boucs émissaires pour dévier la colère sociale, créer un climat de guerre civile propice à une prise du pouvoir. Cette stratégie n’a rien d’originale, à l’instar des conflits ethniques ou religieux qui agitent de nombreux pays. Pour compléter le tableau, les experts en tous genres jettent la responsabilité des troubles sur la démission des parents, en particulier les familles mono-parentales... Peu importe, l’ordre moral progresse.

Déni social

On a presque tout dit sur la laideur et la déshérence des cités péri-urbaines. La transformation du logement en rente immobilière a été poursuivie par la gauche au pouvoir, sourde aux contestations des associations.

L’apartheid des banlieues mérite mieux que les hésitantes condamnations d’une partie de la " gauche " incapable d’exiger la levée d’un dispositif inique et de décréter une mobilisation générale pour dénoncer le parcage des plus démunis dans un dispositif social-sécuritaire qui opère par le mépris et le déni des causes structurelles de la pauvreté.

En dépit du discours de surface " républicain égalitaire ", maintenu par sa seule vertu rhétorique, le démantèlement des services publics et des services sociaux s’est accéléré. La prestation de services " différenciée " selon des zonages géographiques et des populations : " quartiers difficiles ", " classes dangereuses "... marque l’individualisation de l’action publique.

Supprimées il y a 3 ans, la restauration ces jours-ci de certaines subventions au profit des associations travaillant dans les quartiers péri-urbains, est due au fait du prince et non à l’exercice de l’intérêt général.

La politique de l’éducation comprise seulement dans sa perspective économique ; une fourniture de service, illustre cette orientation jusqu’à la caricature et sonne le glas de l’école pour tous, obligatoire, gratuite et émancipatricee. Le référentiel néo-libéral est ici fin et moyen. Ce que l’European Round Table of industrials ( ERT, lobby d’affaire très influent en matière d’éducation) a rêvé, de Villepin le réalise : "améliorer la richesse et la diversité de la formation et de l’éducation pour fournir aux économies européennes toutes les compétences nécessaires pour une industrie efficiente et compétitive". Ainsi, " l’émancipation sociale des sujets apprenants " et "leur incorporation au complexe techno-économique capitaliste " passe par la spécialisation précoce et la multiplication de filières de relégation. Le peuple n’est plus éducable !

L’importation de la tolérance zéro et de son "volet social" ; " la discrimination positive ", en dit long sur le seul mode " d’intégration " désormais proposé aux indigènes : la promotion individuelle au détriment de solutions collectives humaines et durables.

La politique a changé de nature et son exercice est " devenu une affaire d’intendance ".

Face au démantèlement de l’Etat et l’organisation à tous les échelons d’une entreprise de confiscation et d’enfermement sans précédent, l’Appel des 200 a su impulser, à l’occasion de la campagne référendaire, une leçon de " saine politique ". Au Traité établissant une Constitution pour l’Europe, il a opposé l’exercice éclatant de la souveraineté populaire. Ce moment politiquement constituant appelle des suites à la hauteur des enjeux.

Pour répondre du vote populaire du 29 mai, nous interpellons les collectifs du 29 mai pour l’exercice d’une plus grande cohérence des critiques et des actions.

Sommes-nous, en dépit des intimidations médiatiques, capables d’affirmer notre solidarité sans faille avec tous les mouvements sociaux sans distinction ?

Derrière les protestations les plus classiques du monde salarial, derrière les révoltes politiques - depuis décembre 1995 jusqu’à la sédition des banlieues - il y a une totale unité des causes : les mêmes effets de destructions sociales liées à la mondialisation et à la paupérisation délibérée des services publics, et surtout, le même autisme d’une classe politique fondamentalement complice, en dépit des facéties de l’alternance.

Si les salariés de Cellatex, de Moulinex ou de la SNCM, tout comme les jeunes des banlieues, doivent en venir aux extrêmes pour se faire entendre, sur qui ces comportements instruisent ? Salariés et jeunes de nos cités, identiquement, sont en révolte contre des promesses ressassées, jamais tenues et un mode de non être des gouvernants aux gouvernés.

A l’heure actuelle, le pacte républicain de la Résistance est enterré. L’heure est à la disparition des services publics que ce soit par leur privatisation, lorsque les entreprises sont rentables (autoroutes, Edf, France Télécom...) ou leur disparition pure et simple, par la suppression de crédits. La rigueur budgétaire imposée par Bruxelles est en train de vider les missions de service publics de tout contenu. Cela hypothèque sérieusement les marges de manœuvre des pouvoirs locaux et nationaux. Derrière cette logique, se profile l’Accord Général sur le Commerce des Services (AGCS) aggravé par la Commission européenne via la directive relative aux services dans le marché intérieur (dite Bolkestein).

La situation est dangereuse, il y a urgence.

" Le sécuritaire est le stade suprême du capitalisme "

Il est temps de stopper la dérive totalitaire du gouvernement.

Il est temps d’arrêter la destruction programmée des services publics par une contestation à la mesure des coups portés au droit à l’existence et à nos libertés fondamentales.

" Il n y a d’autre voie que celle de la publicité s’il s’agit pour un peuple entier d’exposer ses doléances "

Si d’autres mondes sont possibles, ils ne peuvent se réduire à une attente. Le non de gauche a ouvert une brèche et levé d’immenses espoirs. Il permet objectivement de reconfigurer la donne politique. Saurons-nous l’amplifier comme " une marque d’entrée dans un devenir " instruit et fondé sur la radicalité de nos espérances... Tel est l’enjeu de nos retrouvailles les 3 & 4 décembre à Paris.

Signataires :

Jean-Claude Amara, Droits Devant !!

Claire Aymes, Française issue de l’immigration

René Balme, maire de Grigny 69520

Jean-Jacques BAREY, Paris

Pierre Beinsteiner, élève ingénieur, Grenoble, inquiet

Aïssa BENMESSAOUD - Militant associatif Givors (69)

Hamida Ben Sadia, féministe, Alternative Citoyenne

Jean-Pierre Berlan, économiste, directeur de recherche à l’INRA

Olivier Jacques Bernard, Collectif citoyen de Saône et Loire

Paco Bialek, le collectif des intermittents du spectacle de Midi Pyrénées

Marie Bixel, membre du collectif pour une autre Europe de Montceau les mines

Bernard Bosc, réseau féministe RUPTURES

Vincent BREHON, chômeur 26 ans

Pascal Charles, collectif contre la répression du mouvement lycéens

Françine CHARRIER, intermittent du spectacle

Yannick Chenevoy, Maître de Conférences, Université de Bourgogne

Georges-Henri Clopeau

Collectif éditorial Raisons d’agir

Emmanuel Collod, Collectif du 29 mai Lyon Croix-Rousse

Jean-Louis Comolli, réalisateur

Isabelle Costa, Citoyenne du monde

Georges Crolla, militant socialiste pour le NON en Saône et Loire

Marie Pierre Dard, membre du collectif citoyen de Mâcon

Thierry David, travailleur social

Raymond DAUVERGNE, collectif citoyen de Mâcon

Monique Dental, animatrice du Réseau Féministe "Ruptures"

René De Vos, membre du collectif citoyen Mâcon

Jean Druon, réalisateur, Tarn

Adil Eddaou, doctorant en économie appliquée

Jamila El Idrissi, URFIG, membre du collectif du Conflent du 29 mai

Sylvette Escazaux, membre du collectif du Conflent du 29 mai

Nicole Eschmann, française issue de l’immigration, membre du collectif citoyen de Mâcon

Michel Essertaize, retraitée de l’enseignement

Sylvie Faye-Pastor, membre du collectif citoyen de Mâcon

Sylvie Fiora, comédienne

Françoise, militante, Paris

Alexandre Garros, jardinier, faucheur volontaire

Colette GAULIER-HÊME, membre du Collectif du 29 mai du Conflent

Amar Hamdani, enseignant

Thierry Jaccaud, rédacteur en chef de l’Ecologiste

Raoul Marc Jennar, chercheur, URFIG

Laurence Kalafatides, chercheuse, française issue de l’immigration

Jacqueline Kempton, membre du collectif citoyen de Mâcon

Isabelle et Jean Lambrey, Association Imagine la Paix

Geneviève Laffitte, citoyenne, collectif du non du biterrois

Pierre Johan Laffitte, enseignant-chercheur

Erwan Le Calvez, discothécaire, Vannes (56)

Erwan LE GUEN 23 ans, automaticien

Noëlle Guilbon, professeure ( 93)

Pascal Léonard, Prades (66)

Guy Litaud, collectif citoyen de Mâcon

Maryvonne Loiseau, Collectif antilibéal pour une autre Europe du Morbihan

Nader MACHOUCH, Thermicien

Victor Maillard

Sylvie Magnier

Philippe Marlière, politologue, université de Londres

Marie José Mondzain, philosophe, directeur de recherche au CNRS

Philippe Neyrat,

Yves OUDELETTE, militant socialiste, signataire de l’appel des 200 à Tournus

Isabelle PAEZ, ass. Communication

Yves Pagnotte, conseiller municipal de Mâcon, collectif citoyen de Mâcon

Nelly Pegeault, Nature & Progrès

Virginie Podevin, membre du collectif Atos-Est, Junghotz, Haut Rhin

Jacques Pons, membre du collectif du Coflent du 29 mai

Willy Proust

Claude Ramin, médecin, militant associatif, Aix en Provence (13)

Jean-Jacques Rey

Jean-Marie Robert, Séné Morbihan

Simone Ronnel

Jean Roux, membre du collectif citoyen de Mâcon

Gilles Sainati, magistrat, membre du Syndicat de la magistrature

Maximilien Sanchez, etudiant en sociologie
Bernard Sarrazin, membre du collectif citoyen de Mâcon

Iain Simpson-Smith, membre du collectif citoyen de Mâcon

Stephane Tavitian

André Thiry, citoyen libre penseur

Jacqueline Vignon, collectif citoyen de Mâcon

Loïc Wauquier-Dusart, régisseur de théâtre et comédien


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