Souriez vous êtes filmé·es

Fiche pédagogique sur la vidéosurveillance

Les insuffisances de la loi de 95

vendredi 20 juin 2003, par collectif

Le législateur laisse toute appréciation aux responsables de systèmes de vidéosurveillance d’agir. Mais, il existe des moyens d’actions juridiques contre la videosurveillance que tout citoyen peut utiliser.


FICHE PEDAGOGIQUE POUR SVEF

Les insuffisances de la loi de 1995.

Si la loi de 1978 ne protégeait pas les personnes contre tous les systèmes sophistiqués de la vidéosurveillance, elle apportait néanmoins des garanties plus importantes aux administrés que ne le fait la loi de 1995.

1 - le législateur a prévu que les caméras ne peuvent pas être braquées sur les entrées d’immeubles d’habitation.
Or l’installation de caméras sur la voie publique pour surveiller un carrefour dangereux peut aussi surveiller les allées et venues des personnes chez elles.
La loi ne présente pas de garanties suffisantes. Des personnes publiques et des personnes privées ont la possibilité de surveiller la voie publique, voire même l’intérieur des habitations si pour avoir le bon angle de la rue, la caméra est obligée d’être installée à l’endroit précis et contraint de visionner les fenêtres de l’habitation.

2 - le législateur ne s’est pas soucié de l’application de la signalisation du droit à l’information claire et permanente d’être filmé à l’intérieur des magasins.
Il suffit d’aller dans une grande surface pour constater que les panneaux d’informations sont petits ou inexistants.

3 - Le droit de contrôle des enregistrements d’images et de recours sont inexistants.
Ainsi s’il est permis en droit, d’avoir accès à l’enregistrement vidéo de son image, il faut savoir que la loi dispose d’un refus d’accès.
Il peut être opposé à la personne un motif tenant à la sûreté de l’Etat, à la sécurité publique…
Sous le terme sécurité publique - qu’entend t-on ? - cette notion reste vague et peut revêtir n’importe quel prétexte. En fait, le motif sera apprécié au cas par cas par l’autorité responsable du système.
De même, le droit des tiers est une notion subjective qui sera appréciée en fonction du contexte.
Ce qui veut dire que le législateur laisse toute appréciation aux responsables des systèmes de vidéosurveillance.

4 - La loi prévoit le droit de vérifier que les enregistrements de surveillance sont détruits dans le délai d’un mois (espace public) et de 3 jours pour les magasins.
Il n’y a rien qui garantit que les bandes sont effectivement détruites après leur utilisation.
Ce sont des personnes publiques et privées, détenteurs de système de vidéosurveillance qui font la loi.

5 - Le recours auprès de la commission départementale
Toute personne peut saisir cette commission en cas d’installation de surveillance abusive.
La volonté du législateur va dans le sens d’une protection des libertés mais il n’a pas assuré l’indépendance des membres de la commission. Comment sont-ils recrutés ? Qui sont-ils en réalité ? Quels sont leurs pouvoirs ?
Nous ne pouvons donc pas juger du fonctionnement « démocratique » de ces commissions. Elles peuvent s’avérer efficaces comme inutiles.

En cas de décision au niveau national que « Souriez vous êtes filmés » s’intègre dans une commission comme une association à Draguignan.
Il faudra que nous ayons la possibilité d’examiner la composition de la commission pour vérifier les garanties de son indépendance.
Il faudra vérifier son fonctionnement - (voir si ce ne sont pas des commissions fantômes dans certaines régions)
Il ne faut pas rêver, si le pouvoir est laissé au préfet de choisir les membres, il n’y aura aucune garantie de protection des droits des citoyens.

Vous pouvez saisir la CNIL dans le cas où les images serviraient à la constitution d’un fichier nominatif pour un délai d’un mois mais elle devient incompétente dans le cas des fichiers nominatifs d’images c’est à dire que les informations détenues dans les fichiers ne seront pas des images mais des données manuscrites collectées à partir des images comme pour la « biométrie ».
Evidemment, la loi de 1995 n’a pas prévu ce cas.

6 - Quelles voies de recours ? - Quelle est la juridiction compétente ?
La loi n’a spécifié aucune voie de recours spécifique. Chaque citoyen utilise les voies de recours ordinaires.
SVEF de Toulouse a engagé un référé auprès du Tribunal de Grande Instance. C’était le recours le plus « logique » au niveau du droit. Or, tout d’un coup le législateur découvre que ce n’est pas le tribunal compétent et qu’il faudrait le déposer devant un tribunal administratif.
L’avocate de SVEF a choisi « habilement » la voie du flou juridique de la loi de 95 pour défendre le droit du citoyen. C’est une première. Ce procès va t-il permettre de faire avancer le droit des libertés du citoyen dans le bon sens ?

Toutefois plusieurs moyens sont possibles pour tous citoyens de défendre leurs droits aux libertés comme :
  Il est possible d’attaquer la décision d’un préfet autorisant la mise en œuvre du système de vidéosurveillance devant la juridiction administrative en invoquant la violation du principe de proportionnalité.
  Si l’installation de la vidéosurveillance relève d’une personne publique. Vous saisissez le juge administratif dans les deux mois pour excès de pouvoir et violation du principe de proportionnalité.
  Tout citoyen peut saisir le juge administratif et invoquer les dommages que la caméra produit sur sa vie privée. Mais ils sont confrontés alors à un problème de preuve et d’étendue du préjudice invoqué.
  Il peut essayer de saisir le juge judiciaire (gardien de la liberté individuelle) en invoquant une atteinte à sa vie privée. C’est une procédure qui n’a jamais été tenté jusqu’à présent.
  Ce qui est certain, si le système de vidéosurveillance est installé par une personne privée, le juge judiciaire est compétent. La personne peut invoquer une violation de la liberté individuelle de liberté d’aller et venir, de la vie privée. Elle peut invoquer la responsabilité selon l’article 1382 du Code Civil.
  Si des citoyens estiment être victimes d’un système de vidéosurveillance non conforme à la loi, ils peuvent déclencher des poursuites pénales en déposant une plainte auprès du juge avec constitution de partie civile.

Si cette loi laxiste favorise l’implantation sauvage des caméras. Selon Paul Virilio « On veut faire la vivisection du corps social. On veut faire, je crois, la mise à jour de ce qui est secret. Sauf qu’en mettent à jour ce qui est secret, on risque de tuer ce qui est vivant. »
Il existe des actions à mettre en place et à imaginer dans le cadre européen.
Marie-Claude


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