Souriez vous êtes filmé·es

La biométrie utilisée dans les cantines scolaires

Des élèves transformées en rats de laboratoire

Résistance dans la vallée de Chevreuse à la Biométrie(Gif-sur-Yvette)

mardi 13 décembre 2005, par collectif

Parce qu’ils oont fait preuve de désobéissance civile, 3 étudiants sont inculpés de destruction de biens publiques. Or, ils ont osé dénoncer la mise en place de ces systèmes de surveillance et leurs conséquences sur le comportement des enfants. La biométrie est au service d’une politique totalitaire et policière : le panopticon de Benthan paraît dépassé. cf texte contrebiometrie@yahoo.fr


« ACCEPTATION PAR LA POPULATION
La sécurité est très souvent vécue dans nos
sociétés démocratiques comme une atteinte aux
libertés individuelles. Il faut donc faire accepter
par la population les technologies utilisées et
parmi celles-ci la biométrie, la vidéosurveillance
et les contrôles.
Plusieurs méthodes devront être développées
par les pouvoirs publics et les industriels pour
faire accepter la biométrie.
Elles devront être accompagnées d’un effort
de convivialité par une reconnaissance de la personne
et par l’apport de fonctionnalités attrayantes
 :
Éducation dès l’école maternelle, les enfants
utilisent cette technologie pour rentrer dans l’école,
en sortir, déjeuner à la cantine, et les parents
ou leurs représentants s’identifieront pour aller
chercher les enfants.
Introduction dans des biens de consommation,
de confort ou des jeux : téléphone portable,
ordinateur, voiture, domotique, jeux vidéo.
Développer les services « cardless » à la banque,
au supermarché, dans les transports, pour
l’accès Internet, ...
La même approche ne peut pas être prise pour
faire accepter les technologies de surveillance et
de contrôle, il faudra probablement recourir à la
persuasion et à la réglementation en démontrant
l’apport de ces technologies à la sérénité des populations
et en minimisant la gène occasionnée.
Là encore, l’électronique et l’informatique peuvent
contribuer largement à cette tâche. »
(www.gixel.fr - voir le « livre bleu »)
Voilà, c’est clair, on vous habitue, vous, en tant
que présumés « bons élèves des nouvelles technologies
 ». Après avoir testé ces dispositifs sur les
prisonniers, c’est au tour des élèves de secondaire
de servir de cobayes. Cobayes d’acceptation,
transformés en rats pour ce laboratoire grandeur
nature dont a besoin la biométrie. Oui, besoin, car
ce n’est pas encore fiable, parce que ça fait peur,
parce qu’il existe « des réticences psychologiques
ou physiologiques », et que ce n’est qu’en testant
ces technologies pour de vrai, sur le dos de nos
libertés et avec le prétexte de sécurité absolue,
que les gouvernements comme le nôtre qui veulent
un passeport et une carte d’identité biométriques,
qui veulent une carte de sécu biométrique
enfin qui veulent du biométrique en plein délire
bureaucratique pourront nous le faire avaler avec
le label : « futur immédiat ».
Les technologies sécuritaires modèlent les
espaces dans lesquels toute une génération se
construit. Régulièrement, les experts consultés
s’inquiètent de leurs conséquences sociales mais
ces technologies originaires du milieu carcéral,
promues ailleurs au nom de la lutte contre le
terrorisme se propagent en milieu éducatif, sans
débat, comme si vingt ans de discours alarmistes
rendaient inéluctable la transformation des écoles
en prisons.
Car la logique est bien carcérale. Elle s’ajoute
dans les établissements scolaires à la multiplication
des injonctions focalisant le rôle des enseignants et
de l’institution au contrôle de la présence. Les récents
remplacements de courte durée sont un pas
de plus dans ce sens : l’important c’est de garder
les élèves. Pudiquement,les enseignants regretteront
que leur rôle soit de plus en plus limité à de la « garderie
 ». Mais la garderie est une démarche éducative
qui s’appuie sur une formation et ne se limite pas
à contraindre un enfant à la présence dans un lieu
clos. De même, à la différence de son application
dans les aéroports, la biométrie à la cantine ne répond
pas à une menace, à empêcher une intrusion,
elle vise, officiellement à contrôler la présence que
ceux qui devraient être là. « Le principal du collège
Joliot-Curie (de Carqueiranne) dit chercher à obtenir
une « transparence absolue » : il s’agit de savoir
en permanence, et en temps réel, où sont et ce que
font les élèves, notamment s’ils mangent ou s’ils ne
mangent pas. Dès lors, on ne peut pas s’empêcher
de penser au panopticon de Bentham. » ( Guchet )
Ce qui subsiste aujourd’hui de la volonté de préserver
une présence humaine pousse les conseils
d’administration au recrutement de personnels sans
formation à des postes de vigiles pour de faibles salaires.
Le chemin est tout tracé pour la privatisation
prochaine de ces fonctions. Un enseignant d’anglais
du lycée de Mantes remarquait à juste titre qu’on
enseignerait Orwell et Bradbury, à des élèves lâchés
ensuite dans des espaces dont les moindres recoins
sont sous surveillance vidéo.
Le développement de ces technologies marque
également la progression des logiques policières à
l’école. A cette époque où c’est le ministre de l’Intérieur
qui demande une évaluation des ZEP, l’avènement
de la vidéosurveillance et de la biométrie au
détriment de l’encadrement humain réduisent les
possibilités d’intervenir en amont ou pendant les
Quʼest-ce que la biométrie ?
La biométrie, cʼest le mot high tech employé aujourdʼhui pour désigner une science vieille de plus
dʼun siècle : lʼanthropométrie. Elle a été rebaptisée pour cacher ses origines et ses buts ; celle-ci servait à lʼorigine
et jusquʼà aujourdʼhui à la police et à la science criminelle pour identifier les criminels, les délinquants, les
hors-norme, sans compter les « mal-pensants ». Vers 1900, avec Bertillon, on commence à utiliser les photographies
dans les fichiers de police, puis les empreintes digitales, jusquʼà ce que la biométrie serve aux nazis pour
authentifier et trier tous ceux quʼils envoyèrent dans les camps de la mort. Cette technique, couplée à la mise
en place de la carte dʼidentité obligatoire sous Vichy, en France comme dans de nombreux autres pays dʼEurope
fut le support scientifique à lʼhorreur de la déportation. Puis elle servit à tous les régimes totalitaires qui ont
vu le jour au XXème siècle à travers le monde pour repérer et éliminer les esprits libres et autres trouble fêtes.
Mais les désirs de progrès galopant et les innovations technologiques sʼenchaînant dans un rythme effréné,
nous voici tous devant une réalité bien dure à regarder : ces systèmes biométriques et leurs logiques de contrôle
absolu commencent à sʼétendre dans toutes les sphères publiques et privées jusquʼau collège-lycée Maurice
Ravel de paris 20ème.
La technologie biométrique permet dʼauthentifier lʼidentité dʼune personne grâce à son propre
corps : empreintes digitales, iris, contour du visage, gabarit de la main, etc. Une machine vient prendre la place
de la personne sensée contrôler un accès : plus besoin de parler ni de présenter une carte : une machine se
charge désormais de transformer une partie de mon corps en code numérique et hop, on est au top du progrès,
génial. Une quinzaine de lycées ou collèges en France ont adopté ce dispositif pour vérifier que les élèves ne
fraudent pas à la cantine, ou pour pallier aux pertes de cartes, cataclysmes abominables pour lʼorganisation
dʼune vie scolaire ! Ces derniers appareils fonctionnent ainsi : on vous enregistre une première fois le contour
de la main dans une machine, puis vous retenez un code à 7 chiffres, votre main étant envoyée dans une base
de données dont le proviseur devient le « responsable de traitement ». Tout naturellement, le nom quʼa choisi le
Conseil de lʼEurope pour les élèves se soumettant à cette procédure est « enrôlé ». Voilà, cʼest fait, plus dʼélèves,
plus de parents dʼélèves, mais des enrôlés et des parents dʼenrôlés, donnant pleine au confiance au proviseur,
pardon, au « responsable de traitement ».

Voici le scoop, que nous avons eu par un parent d’élève, voici le mauvais
tour que l’on est en train de vous jouer : des appareils biométriques
vont incessamment sous peu être installés dans la cantine de Ravel. Le
proviseur et les professeurs de l’établissement n’ont pas jugés bon de
vous en avertir directement, ni même de vous informer sur ce que sont
ces machines...
Pourquoi
votre établissement
se transforme-t-il
en laboratoire
et vous en cobayes ?
Comme à Ravel, dans la majeure partie des
établissements où des systèmes de biométrie sont
installés, les parents et les élèves ne sont mis au
courant que devant le fait accompli, après vote au
conseil d’administration, et surtout après installation
et mise en marche des appareils. Dans votre
collège-lycée, les délégués de classe ont été convoqués,
on leur a dit que ce « truc » allait être installé,
on leur a expliqué comment ça marchait, en gros,
et chargé de faire passer l’info. Pour une sortie
de classe, vous seriez mieux informés, mais la biométrie,
c’est pas si grave, « ça fait James Bond »
ou « ça fait moderne », alors vous comprendrez
bien que les questions éthiques, et les effets à long
terme, on s’en balance, n’est-ce pas ?
Mais ce n’est pas pour rien que tout ce passe
ainsi dans la plus grande absence de dialogue et
de réflexion. Souvent, le conseil général débloque
15 000 euros pour ça et seulement ça (oui, c’est
le prix total, avec les logiciels, les formations et les
câbles qui vont avec, mais bon 15 000 euros c’est
une misère pour Ravel). Alors le proviseur dit oui,
et le CA dit oui, et en avant.
Or, si le conseil général débloque soudainement
15 000 euros pour des enfants, c’est qu’il a bien lu
les recommandations du groupement d’industriels
en micro-électronique et informatique (GIXEL)
aux élus en matière de biométrie :
conflits et cantonnent toute réponse à l’a posteriori.
Alors qu’un surveillant intervenait pour tempérer
avant une bagarre, ou pour séparer, la vidéo ne fait
qu’enregistrer un affrontement qui va jusqu’à son
terme et donc ses conséquences les plus graves,
pour ne servir que de preuve, lors de l’investigation
future. Car, ici encore, c’est bien l’un ou l’autre,
l’homme ou la machine tant les moyens humains se
réduisent au fur et à mesure que progressent ces
dispositifs. Au lycée J. Rostand de Mantes la Jolie,
le projet de 104 caméras de vidéosurveillance a
ainsi été annoncé le même jour que la suppression
d’un poste d’aide éducateur. A Alès, ces personnels
ont d’abord été cantonnés à des tâches de bureau,
notamment de contrôle des absences avant que
les caméras soient installées. Face au manque de
personnel compétent et présent, la seule réponse
possible n’est plus que policière. Les interventions
policières dans les établissements, les patrouilles ou
les arrestations se multiplient donc. On est bien loin
de l’éducation.
Mais on vend de la biométrie, en douceur. Ceux
qui sont familiers des méthodes de relations publiques
reconnaîtront les stratégies de communication
des firmes de l’agroalimentaire pour faire accepter
les OGM.
La CNIL rappelle fréquemment dans ses pathétiques
tentatives de contrôle que l’usage de ces technologies
doit être contraint par la « proportionnalité »
entre l’exigence de contrôle et le processus utilisé, ou
que chacun a « droit à l’oubli » et que les enregistrements
sur « listes noires » et autres fichiers doivent
pouvoir être effacés. Ce droit à l’oubli, fondement
du droit est aussi un fondement de l’éducation.
La relation avec l’enseignant est pour l’enfant un
temps à l’abri, un temps de confiance ou la compréhension
peut suivre l’erreur et permettre qu’on
« oublie tout », qu’on « ferme les yeux pour cette
fois », renvoyant l’enfant, lavé, à la possibilité de se
racheter, de progresser.
La place de cette relation, entre humains, recule
à mesure que progresse l’oeil froid de la machine
qui vient conforter une pénalisation de rapports
éducatifs dont la référence est la délirante théorie
de la « vitre brisée » fondement des politiques de
tolérance zéro. Si « qui vole un oeuf, vole un boeuf »
ou « qui brise une vitre ouvrira le feu au fusil automatique
ou dealera la cocaïne au kilo » alors sur les
actes banals de l’enfance qui étaient source d’apprentissage
bienveillant de la norme s’abattra une
répression automatisée, implacable et démesurée.
Le rapport parlementaire Benisti, sur la « prévention
de la délinquance » qui préconise la création d’un
« système de repérage et de suivi des difficultés et
des troubles du comportement de l’enfant » mis en
place non seulement dans les établissements scolaires
(de la maternelle au lycée), mais aussi dans les
crèches montre les liens qui peuvent exister entre
une vision politique de l’enfance, une pathologisation
de la délinquance et ces technologies hors de
contrôle.
Le procès de la biométrie
Le 17 novembre, à Gif-sur-Yvette, dans l’Essonne(
91), la première révolte a eu lieu contre ces méthodes
et ces machines tyranniques. Une vingtaine
de personnes sont allés distribué des tracts, jouer
une saynète mettant en scène l’infamie humaine que
représentent ces machines sur nos rapports sociaux,
la transmission de l’autorité à l’ordinateur, la numérisation
de nos corps, et la tristesse d’un monde dans
lequel le progrès et la sécurité font oublier la parole
et la liberté. Et font oublier les leçons de l’histoire.
Au cours de cette manifestation pacifiste, les appareils
biométriques de la cantine ont été détruits, retour
à l’envoyeur... Trois étudiants de la Sorbonne
passent en procès ce vendredi à Evry, pour « destruction
de bien d’autrui ».
Il est encore temps de résister, de dire non et de
parler, de débattre et de riposter à la rupture de dialogue
qui sert de stratégie à ceux qui croient avoir
du pouvoir sur nos corps et sur nos vies. Nous pouvons
refuser l’installation de ces machines, refuser
de mettre nos mains dans la bouche machines inhumaines
qu’on nous propose pour mieux gérer les
flux. Il est encore temps.
Pour ceux qui aimeraient témoigner de la situation
à Ravel et aider les inculpés à se défendre, ou
qui chercheraient simplement de plus amples informations,
vous pouvez nous contacter à
contrebiometrie@yahoofr


+ sur le web

Proposer un article | Nous contacter | Plan du site | Admin | Accueil
squelettes spip SPIP Suivre la vie du site @elastick.net