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Fiertés folles
29 novembre, par Gaëlle Desnos — Marine Summercity
Après près de dix ans d'absence, la Fada Pride marseillaise renaît. À la barre : les fous, les folles, les fatigués de la psy et de ses éternels dysfonctionnements, les énervés de la violence sociale sans cesse reconduite.
« Nous avons le droit et le devoir de vivre notre vie comme nous l'entendons. » Au micro, Lola* vacille un peu, mais ne flanche pas. Elle est venue dérouler devant une petite cinquantaine de personnes réunies place Jean Jaurès à Marseille. Le rendez-vous qu'ils et elles se sont données ce jour-là porte un nom délicieusement frondeur : la Fada Pride. Fierté folle, folie fière, fièrement fêlés, qu'importe l'ordre des mots, l'idée est là : rappeler au système psy que ses usagers et ses usagères ne sont ni des ombres ni des numéros de dossier.
« Ici on veut faire avec ceux qui subissent le système psy ! »Sans doute un détail pour le gouvernement qui, en octobre 2024, déclarait la santé mentale « Grande cause nationale » de l'année 2025, tout en oubliant d'y mettre les « grands » moyens1. Courant octobre, des prides se sont donc organisées dans cinq villes de France pour dénoncer des pratiques maltraitantes et une mécanique qui reproduit la violence sociale.
Par et pour les personnes consTernéesLa Fada Pride marseillaise est apparue pour la première fois en 2015, puis une seconde fois en 2016, avant de tomber dix ans dans l'oubli. Mais cette année, l'événement s'est relancé le samedi 18 octobre dernier. Sur place, deux grosses enceintes jouent de vieux standards cubains, glissent sans prévenir à de l'électro, et diffusent quiconque désire prendre la parole. Des stands d'infos et de linogravures agrègent les participants et les curieux. À la table des zines, la revue Soin'Soin fait la réclame pour ses quatre superbes numéros. Mathieu, son concepteur, rappelle la teneur du projet éditorial : « C'est fait par et pour les personnes concernées ». Ce jour-là, cette phrase est dans toutes les bouches. « Ici on veut faire avec ceux qui subissent le système psy ! » confirme Anakin, l'un des organisateurs de la Fada marseillaise. Le « système psy », rappelle le communiqué de l'événement, c'est bien souvent « l'enfermement, les soins sans consentement, les violences psychiatriques et un recours systématisé au tout-médicament ».
En 2022, environ 8 000 personnes hospitalisées sans leur consentement en psychiatrie ont fait l'objet d'au moins une contention mécaniqueEn 2022, environ 8 000 personnes hospitalisées sans leur consentement en psychiatrie ont fait l'objet d'au moins une contention mécanique. À cela, « ceux qui subissent » répondent : « Rien sur nous sans nous ! »
Au gré des discussions, les vieux thèmes de la psy reviennent – l'exclusion, les galères de boulot, la rue, la conso de produits, les médocs qui cassent le corps et la tête –, tandis que de nouveaux affleurent. Un pont semble se dessiner avec les problèmes soulevés par la communauté LGBTQ+. « Le lien c'est le contrôle des corps, explique T., psychanalyste. L'hétéropatriarcat, tout comme la psychiatrie, impose ce type de domination. En hosto, on peut te priver de liberté, t'isoler, utiliser sur toi la contention physique ou chimique... » D'autant que la psychiatrie a un lourd passif avec la communauté LGBTQ+ : la pathologisation de l'homosexualité a eu cours jusque dans les années 1970 et la transidentité n'a officiellement été dépsychiatrisée que tout récemment2. « Aujourd'hui, les personnes queers subissent de plein fouet l'extrême droitisation du monde, la paupérisation, la violence. La communauté va mal. Alors forcément, on commence à converger », relève Anakin.
En France, une personne sans titre de séjour sur six souffre de stress post-traumatiqueLa situation des demandeurs d'asile, souvent traumatisés par des parcours migratoires douloureux, est aussi l'objet d'une attention particulière. En France, une personne sans titre de séjour sur six souffre de stress post-traumatique, mais selon Anakin « la psy n'est pas à la hauteur ». T. se souvient d'un mineur isolé atteint d'une maladie infectieuse qu'il a accompagné : « Il ne comprenait pas ce que racontaient tous ces Blancs en blouses blanches. Il voulait voir un marabout. Mais au lieu de l'écouter, on est venu me chercher pour le convaincre de se soigner. » Et évidemment, le manque de moyens finit d'aggraver la situation. En 2023, le Haut Conseil à l'Égalité, dans son évaluation des Centres régionaux du psychotraumatisme, constate qu'aucun centre n'assume correctement ses missions : l'embolie est telle qu'ils doivent prioriser en excluant les situations les plus complexes… Fréquentes chez les exilés.
Un monde fouÀ l'atelier pancarte, ce jour-là, un slogan retient particulièrement l'attention : « C'est le monde qui est “fou” ! » Un écho au manifeste de la Mad Pride parisienne et son « nous refusons la pathologisation dont nous sommes l'objet, c'est leur monde qui est malade ». Place de la République à Paris, la militante antipsychiatrique Nan marci clamait : « Nous n'irons jamais mieux dans ce monde capitaliste, seule la révolution porte l'espoir de la santé, nous ne voulons pas de meilleurs soins, nous voulons un autre monde. » Chercheuse en philosophie, elle mobilise le concept de « non-normopathe » – littéralement : maladie de la normalité – qui caractérise « toutes les personnes qui s'intègrent avec facilité au monde tel qu'il existe aujourd'hui »3. C'est, selon elle, déjà une forme de pathologie : « Les honnêtes travailleurs, les bons pères de famille, les bons citoyens ont tellement intégré les normes sociales que ça détruit le principe de leur individualité et de leur subjectivité. […] On est tous et toutes malades du capitalisme mais pas de la même manière. »
Gaëlle Desnos* Le nom a été modifié.
Dans le cadre d'ateliers d'écriture menés par le CoFoR (Centre de formation au rétablissement) à Manifesten, des personnes psychiatrisées et non psychiatrisées se retrouvent. Lola en fait partie. Voici un extrait de ce qu'elle écrit :
« Nous ne serons plus colonisés, oppressés, brimés. Nous nous tiendrons avec force, courage, honneur et dignité devant la toute-puissance du système psy et du médecin sachant qui soigne, mais n'a pour objectif que de guérir. Nous nous tiendrons main dans la main devant l'oppresseur et essaierons par des chemins de traverse de trouver des chamans, medicine men ou guérisseurs qui usent de magie ou de formes traditionnelles alternatives à cette médecine occidentale figée, protocolaire et aliénante. Notre rétablissement et notre pouvoir d'agir sont proches, à portée de main. Ils nous appartiennent. C'est notre terre promise et nous nous battrons pour la reconquérir. Le bonheur ne réside pas dans l'opulence. Il sait se contenter de ce qu'il a et aucun colon médical ne nous le prendra. »
1 En juin 2025, le Sénat publie un rapport intitulé « Santé mentale et psychiatrie : pas de “Grande cause” sans grands moyens ». Constat : la santé mentale se dégrade, surtout chez les jeunes, tandis que l'offre publique est embolisée, inégale et en sous-effectif.
2 Lire « Santé : le parcours du combattrans » CQFD n°244 (septembre 2025)
3 Voir « C'est leur monde qui est fou, pas nous », Lundimatin (06/10/2025).
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La prison en feu ?
29 novembre, par Lluno — Chronique carcéraleLuno est bénévole en prison, et nous en livre un aperçu chaque mois. Un regard oblique sur la taule et ses rouages, par quelqu'un qui y passe mais n'y dort pas. Premier épisode : trouver ses marques.
« C'est un Algérien et un Marocain, ils sont en haut d'un immeuble. Qui c'est qui saute le premier ? » Il pouffe. C'est le genre de gars qui a du mal à attendre pour envoyer sa chute. Je m'approche pour ne pas la rater.
« Ah, je la connais surveillant mais là… je m'en souviens plus.
– Qui c'est qui saute le premier ? C'est l'immeuble ! »
Les deux se marrent, et de bon cœur on dirait. Un maton grisonnant et un jeune détenu maghrébin en requins. Je suis paumé.
Depuis que j'ai mis un pied en taule, j'en ai des dizaines comme ça : des moments où je patine, où ce qui se vit n'entre pas vraiment dans ma grille de compréhension. C'était plus simple avant, quand les choses étaient claires.
Fleury, novembre 2017. Première fois que je vois une prison d'aussi près et elle est gigantesque : 140 hectares, près de 4 500 personnes incarcérées, la plus grande zonz d'Europe (encore une belle victoire pour la France). J'apporte un sac d'affaires pour mon pote. Des habits, quelques bouquins et une paire de baskets neuves que j'ai galéré à choisir – fallait-il qu'elles aient l'air onéreuses pour que ça impose le respect ou au contraire bon marché pour ne pas attiser la convoitise et donc les emmerdes ? Le samedi matin, c'est jour de visite : il y a foule devant la maison d'arrêt pour hommes. Beaucoup de femmes et de gamins de tout âges, des ados, de rares types plus âgés. On attend sous le crachin. Un maton de deux mètres bloque l'entrée sans fournir d'explication pour le retard. Quand la porte s'ouvre enfin, il crie, repousse ceux qui se pressent, tutoie, se moque de qui ne parle pas bien français. J'ai les boules pour les familles qui se font humilier par ce blaireau en uniforme mais qui seront encore là samedi prochain, et celui d'après.
Il me faut quelques années avant de remettre un pied en prison, cette fois en tant qu'intervenant aux côtés de plusieurs assos. Les établissements que je fréquente n'ont rien à voir avec une usine comme Fleury : ils sont relativement petits – des « boutiques à l'ancienne », « familiales » presque. À l'intérieur et au-delà des blagues de maton, je découvre un monde chelou. Les prisonniers que je rencontre ne sont pas spécialement contre la taule et les personnels, eux, ne se font guère d'illusions sur son utilité. Pour les premiers, c'est parfois une étape prévue, anticipée. Et s'ils la jugent injuste pour eux, elle serait « bien méritée » pour d'autres. Quant aux seconds, ils sont trop bien placés pour savoir que ce n'est pas l'enfermement à trois ou quatre par cellule de 9 m2 qui autorise à réfléchir et à « donner du sens à la peine », comme disent les textes de loi.
Moi, j'arrive là avec mon bagage anticarcéral et mon vieux seum toujours pas digéré. Mais je sais que je viens ici pour tremper ces idées tranchantes dans le réel, voir si ça tient. À la fin, si les surveillants sont des humains et les taulards aussi, est-ce qu'on criera encore « La prison en feu, les matons au milieu » ?
LunoLa prison – comme le reste – ce sont celles et ceux qui la subissent qui en parlent le mieux. Je vous incite donc à lire des écrits de taulards et à suivre ce que font les camarades de L'envolée qui donnent depuis plus de vingt ans la parole aux enfermé·es.
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En Allemagne, un projet discriminant de lutte contre l’antisémitisme
29 novembre — Morceaux volésLe média d'investigation indépendant allemand Correctiv révèle ce mois-ci les dessous d'un plan de lutte contre l'antisémitisme soutenu par le ministre de la Recherche qui cible spécifiquement les jeunes musulmans.
« Après avoir été approuvé par le ministère de la Recherche, le programme “Dis-Ident” de recherche et de prévention contre l'antisémitisme a officiellement démarré en juillet dernier. [...]
Selon l'entreprise Mind qui pilote ce plan, l'objectif est de développer des stratégies contre l'antisémitisme lié à Israël et la radicalisation islamiste dans les écoles allemandes. Il s'adresse principalement aux élèves musulmans issus de l'immigration, et doit les amener à réfléchir sur les préjugés antisémites, par exemple dans le cadre d'ateliers de théâtre et de jeux de rôle. [...]
Le fondateur et directeur général de Mind est un homme connu du grand public grâce à ses nombreuses apparitions dans des talk-shows et interviews : Ahmad Mansour. Ce psychologue, considéré par certains comme un expert de l'islamisme, est controversé en raison de ses déclarations critiques à l'égard de l'islam. En juillet 2021, par exemple, il déclarait dans un podcast : “L'islam ne s'est jamais intégré dans une autre culture et ne le fera pas non plus en Europe.” [...]
Contrairement à ce qui se passe normalement dans l'attribution de subventions publiques, Mansour et ses partenaires n'ont pas dû passer par un processus concurrentiel pour obtenir des fonds. Dans un tel processus, le ministère lance un appel d'offre pour un programme de recherche, et les instituts de recherche soumettent différentes propositions. Celles-ci sont ensuite examinées par des experts. [...]
Dans “Dis-Ident”, les députés [...] majoritairement issus du Parti libéral-démocrate, ont décidé que le ministère de la Recherche devait subventionner l'entreprise Mind sans passer par une telle procédure. [...] Une décision qui soulève des questions. [...]
Critiques dévastatrices des expertsComme il est d'usage dans ce genre de procédures, le ministère de la Recherche avait pourtant chargé des scientifiques externes d'examiner la description du projet. [...] Correctiv a pu consulter les rapports d'expertise présentés à l'été 2024. Leurs conclusions étaient dévastatrices. [...]
Ils critiquent l'absence “d'hypothèses et de questions de recherche vérifiables empiriquement” et regrettent également l'absence d'une présentation détaillée du plan de recherche et des méthodes, ainsi que de la manière dont ceux-ci devaient être appliqués. [...] Le projet, dont l'efficacité est plus que douteuse, semble avant tout refléter la vision du monde d'Ahmed Mansour. [...]
Selon les experts mandatés par le ministère, ce plan de recherche et prévention reflète “une vision négative des personnes issues de l'immigration et de confession musulmane”. Les thèses formulées reposent sur l'hypothèse selon laquelle les attitudes antisémites seraient “inhérentes” à la “culture musulmane”. [...] Ces mêmes experts ont ainsi exprimé leur inquiétude quant au fait que les mesures prévues pourraient discriminer les enfants et les jeunes issus de l'immigration et de confession musulmane. […] Autant de critiques qui n'ont pas été intégrées au projet “Dis-Ident”. [...]
Ce qui est concrètement prévu avec les jeunes dans le cadre de ce programme et comment leurs droits seront garantis est également flou. Les premiers travaux empiriques et la collecte de données devraient commencer début 2026. »
Justus von Daniels -
Football social à l’irlandaise
29 novembre, par Eliott DognonFace à la décadence du sport professionnel soumis aux règles capitalistes, des Irlandais·es luttent à contre-courant pour bâtir un autre modèle. À Dublin, le Bohemian Football Club, détenu entièrement par ses fans, se mobilise pour redéfinir l'utilité sociale du sport en soutenant diverses causes, dont celle des Gazaoui·es.
Les adeptes du groupe de rap nord-irlandais Kneecap ou du groupe de rock irlandais Fontaines D.C. – tous deux connus pour leur soutien à la Palestine et leurs engagements sociaux – n'ont pas pu passer à côté. Qu'il soit noir et rouge, bleu ou blanc, le maillot de l'équipe de foot des Bohemians de Dublin était dans tous les festivals cet été. Même l'activiste suédoise Greta Thunberg le portait sur la flottille humanitaire qui se dirigeait vers Gaza en juin dernier. Et pour cause, le club, qui brille rarement au-delà des terrains de l'île d'Émeraude, s'est associé à Fontaines D.C. en décembre 2024 pour réaliser le 3è maillot (le bleu) de l'équipe. Objectif : reverser 30 % des profits sur les ventes à l'organisation humanitaire Medical Aid for Palestinians. « Défendre les Palestiniens face au génocide perpétré par Israël est d'une grande importance pour les membres et supporters des Bohemians » déclarait le club dans un communiqué.
Les grands clubs préfèrent quant à eux sacrifier toute humanité sur l'autel de la sacro-sainte diplomatie de la thuneHabituellement, la dénonciation des horreurs de ce monde et l'engagement politique ne dépassent que rarement les tribunes – encore remuantes, bien que de plus en plus étouffées – ou les équipes de seconde zone. Les instances et plus grands clubs préfèrent quant à eux sacrifier toute humanité sur l'autel de la sacro-sainte diplomatie de la thune. En témoigne l'amende de 17 500 euros infligée par l'UEFA (Union européenne des associations de football) en octobre 2023 au Celtic Glasgow pour le soutien affiché de leurs fans à la cause palestinienne.
Les Bohs n'en sont pas à leur coup d'essai ! En 2020, pour dénoncer le Direct Provision, le système défaillant irlandais de prise en charge des exilé·es, iels s'associent à Amnesty International et au Movement of Asylum Seekers Ireland (MASI) pour réaliser un autre maillot sur lequel iels placent le message « Refugees Welcome » au centre – à l'endroit normalement dédié au sponsor principal. Une initiative qui donne de l'air sur une île rongée par les actes de violence xénophobe, en constante augmentation, et qui touchent principalement les personnes exilées depuis les émeutes racistes de Dublin de novembre 20231.
Dans un milieu toujours plus financiarisé, où des fonds d'investissement prennent les passionné·es de baballe pour des vaches à lait, les Bohs proposent un modèle alternatifSi tout cela est rendu possible, c'est qu'il n'y a aucun intérêt financier supérieur au club. Le Bohemian Football Club est tout simplement détenu à 100 % par ses supportrices et supporteurs qui payent une adhésion annuelle et décident quelles causes le club doit soutenir, le prix des billets, les projets de rénovation de leur stade... En 2020, le club décide de recruter Daniel Lambert pour le poste de Chief operating officer (Directeur des opérations), lui qui n'est autre que le manager de Kneecap. La boucle est bouclée !
Alors oui, on peut légitimement arguer que faire de ses engagements sociaux et politiques des arguments marketing pour vendre plus de places et de produits dérivés n'est pas jojo. Mais il permet d'apporter une visibilité et une aide matérielle nécessaires aux Gazaoui·es qui en ont désespérément besoin. Dans un milieu toujours plus financiarisé, où des fonds d'investissement prennent les passionné·es de baballe pour des vaches à lait, les Bohs proposent un modèle alternatif. « Il existe peu d'institutions dans ce monde qui tiennent fermement et sans fléchir face à l'oppression. Le Bohemian F.C. en fait partie […]. On sera toujours à leurs côtés », clamait Carlos O'Connell, le guitariste de Fontaines D.C2. Le football, comme la musique, ne devient-il pas un prétexte pour se rassembler et commencer une révolution ?
Eliott Dognon
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Et ça gratte
29 novembre, par L'équipe de CQFD — Ça brûle !Après la rentrée de septembre, l'équipe a mis les mains dans le cambouis. Les jeunes pousses et le conseil des sages se sont réunis pour le plénum annuel. Pour le point finance, Vé à la baguette. Camemberts, graphiques en bâton, tableau Excel et PowerPoint, une armada à émouvoir les comptables les plus chatouilleux. Bon, nous les chiffres ce n'est pas notre fort, mais on a compris une chose : on est dans la merde. Action, réaction ! Tout en préparant le numéro de novembre (et celui de décembre), la réunionite a gangréné CQFD : il a fallu pondre une campagne de dons en deux semaines. Album de reprises de tubes punk, flash mob sur la Canebière, concert sur le Vieux-Port façon Les Enfoirés, bouteilles à la mer, on a minutieusement étudié toutes les pistes. Finalement on est resté plus tradi : un texte bien ficelé, une soirée de soutien dans quelques mois, la présentation du dernier numéro au café-librairie Manifesten et une cagnotte en ligne.
Deux innovations quand même, et pas des moindres. D'abord la rédaction s'est enrichie d'un nouveau membre : Paul, du pôle vidéo. Ça ne s'invente pas… Arrivant avec une motivation à toute épreuve et une vision globale, notre vidéaste en chef a rapidement pris les choses en main pour nous pondre un appel à soutien du feu de Dieu. La seconde : une cuvée CQFD, brassée dans les chaudrons de notre monomaniaque de l'ex-Yougoslavie, Eliott. Faible en alcool, fruitée et houblonnée, nous souffle-t-il à l'oreille. Pas de quoi brasser des mille et des cents, mais on pourra au moins se désaltérer à l'œil. Pour le sprint final, aka le bouclage, Malo, un copain de L'Empaillé, et son fromage aveyronnais, plus proche du munster que du cantal, ont apporté un coup de fouet salvateur. Pour ce mois-ci, mission accomplie. Ouf. Toute la rédaction est maintenant suspendue à vos porte-monnaie, en espérant ne pas mettre la clé sous la porte.

